1/2 - "Marley & moi" de John Grogan/... Ou quand un chien "bébé de la famille" manque se faire rejeter par la maîtresse de maison, victime d'un baby-blues dévastateur. Tout s'est formidablement terminé pour Marley, mais il a fallu beaucoup d'acharnement, de foi et d'amour familial !
Marley Grogan (1990-2003, labrador de 45 kgs)
& sa famille humaine
Extrait du livre écrit par John Grogan, journaliste américain... (avec l'autorisation de son épouse Jenny, également journaliste, et de leurs trois enfants)
"Nous aurions dû être les gens les plus heureux du monde (...). Nous avions maintenant deux fils, un bout de chou de 17 mois et un nouveau-né. Leur présence était un immense bonheur. Cependant, les ténèbres dans lesquelles Jenny avait sombré durant sa période d'alitement forcé ne s'étaient pas totalement dissipées.
Certaines semaines elle allait bien. D'autres fois, sans prévenir, elle paraissait abattue et défaitiste, empétrée dans une sorte de brouillard.
Nous étions tous les deux épuisés à cause du manque de sommeil. Nous avions rarement le privilège de dormir plus de deux heures de suite. Certains soirs nous avions l'air de deux zombies. Nous nous croisions silencieusement en nous jetant des regards vitreux, Jenny s'occupant d'un bébé, moi de l'autre (...)
Jenny semblait à tout moment sur le point d'exploser et la moindre contrariété - une armoire laissée ouverte, des miettes sur la table - pouvait servir de déclencheur.
La bonne nouvelle c'est que jamais Jenny ne déversait son acrimonie sur l'un ou l'autre des enfants. En vérité, elle s'en occupait avec une attention presque obsédante. Elle se jetait à corps perdu dans cette tâche.
La mauvais nouvelle, c'est qu'elle reportait toute sa colère contre moi, et surtout contre Marley. Avec lui, elle avait perdu alors toute patience. La moindre transgression - et il y en avait encore un certain nombre ! - poussait Jenny dans ses retranchements. Inconscient, Marley continuait à se comporter avec la même joie désinvolte, la même infatigable énergie destructrice.
En dépit des transquillisants que Jenny lui administrait un peu trop souvent, la peur panique de Marley pour les orages ne faisait que croître, devenant chaque jour un peu plus irrationnelle et incontrôlable (...) Il rôdait autour de nous, bavait abondamment. Si nous n'étions pas là, il grattait le linoléum, enfonçait les portes. Je réparais ses bêtises. Quand il fonçait tête baissée dans notre petite maison, tel un éléphant dans un magasin de porcelaine, je le suivais à la trace, remettant les tapis en place, redressant les chaises, nettoyant la bave qu'il laissait sur les murs.
Pour l'amour de Dieu, Marley, lui dis-je un soir alors qu'il se tenais près de moi, la queue frétillante, pendant que je camouflais sa dernière bêtise, est-ce que tu en as marre de vivre ? Il faut que tu arrêtes tout ça.
Un soir, je trouvais Jenny devant la porte d'entrée en train de frapper Marley de ses poings. En pleur, elle s'archarnait contre lui comme si elle battait la mesure sur une grosse caisse :
- "Pourquoi as tu fait cela, pourquoi faut il que tu gâches tout !" criait-elle (Marley avait cette fois-là éventré le canapé et éparpillé le rembourrage sur le sol).
Marley restait figé sur place, sans une plainte, tête basse, jambes repliées comme s'il affrontait un ouragan.
- "Hé ! Hé! Hé! criai-je en attrapant les poignets de Jenny. Allons ! Arrête ! Arrête ! Je m'interposai entre elle et Marley et la regardait droit dans les yeux. Je me trouvais face à une étrangère.
- "Sors-le d'ici, dit-elle d'une voix calme et déterminée (...) Je ne plaisante pas, je veux qu'il s'en aille pour de bon. Trouve lui une nouvelle maison, ou c'est moi qui m'en charge
Elle ne pouvait pas penser ce qu'elle disait. Elle adorait ce chien, en dépit de la longue liste de ses forfaits. Elle était à bout. Elle changerait d'avis.
Je savais que Jenny n'avait pas fait mal à Marley. Je le rudoyais bien plus quand nous faisions semblant de nous battre. Il adorait ça et en réclamait toujours plus. C'était une masse de muscles... mais frappez le doucement sur le derrière, ou grondez le, il agira comme s'il était profondément blessé. Cet animal au physique impressionnant était en réalité un grand sensible. Jenny ne lui avait pas fait mal au sens propre, mais elle l'avait terriblement peiné.
Il était évident que Marley n'était pas le meilleur des chiens, mais il était le plus loyal.
Ce soir là, Marley et moi parcourûmes des kilomètres et nous rentrâmes littéralement épuisés... Jenny me dit d'une voix calme : "je ne veux plus de ce chien ici". Elle paraissait plus déterminée que jamais et répéta son ultimatum les jours suivants.
L'idée de me séparer de Marley me mettais à l'agonie. Si la perte de Marley faisait la différence entre le chaos et la stabilité, comment refuser de réaliser le souhait de Jenny ?? Mais je n'étais pas du genre à abandonner la partie. Et Jenny non plus. Nous n'étions pas le genre de personnes qui se débarrassaient de leurs problèmes par le biais de petites annonces ou autres.
Marley ne ressemblait en rien aux chiens calmes qui avaient accompagné notre enfance. Il avait un bon nombre de mauvaises habitudes et de gros défauts. Il n'avait plus rien non plus du chiot pataud que nous avions ramené à la maison deux ans plus tôt. A sa manière, il essayait de faire de son mieux.
En tant que propriétaires, nous nous efforcions de l'intégrer à notre mode de vie, mais nous devions aussi l'accepter tel qu'il était. Non pas seulement l'accepter, mais aussi le féliciter, l'encourager et louer son indomtable esprit canin. Nous avions introduit dans notre foyer un être vivant, pas un simple objet de décoration à placer dans un coin.
Pour le meilleur et le pire, il était notre chien. Il faisait partie de la famille et, malgré toutes ses tares, il nous avait mille fois rendu notre affection. Une telle dévotion n'avait pas de prix.
Suite et fin demain